Le vent soufflait violement contre mon visage. La neige protégeait de son voile de soie la blancheur maladive de ma peau. L’hiver avait toujours été ma saison préférée. Grâce aux nuits  qui tombaient de bonne heure, J’avais la chance de me méler à la vie qui m’était interdite l’été.  J’aimais  me promener dans le coeur de cette ville qui avait vu naître Hugo. J’avais vu son évolution foudroyante au cours des cinq derniers siècles. Je connaissais tous les batiments et leurs dépendances. Toutes les portes et toutes les églises s’étaient élevées sous mes yeux. Cette ville est un peu comme mon enfant. Mais ne le dîtes pas à Villon. Il n’apprecierai pas. Je ne suis que de passage cette nuit.

 Ce soir, j’ai deux mille cent cinquante deux ans. C’est mon anniversaire. Je me rends chez mon ami victor qui m’a invité pour me lire son dernier roman. Mais d’abord je dois passer voir Bitlibuz l’ancien. Un malkav’ qui me doit un service. Je lui avais appris à séjourner en terre quand l’église le recherchait un peu trop près de son asile. Il lui avait fallut trouver un nouvel âvre de paix. La nature et ses plaines furent son habitat naturel pour presque cinquante ans, avant de pouvoir retrouver sa cellule. Depuis cinq cent ans, j’attendais cette soirée où il aurait l’occasion de se libérer de sa dette. Je lui avait donné rendez-vous ce mois-ci à l’auberge du bon Saint Eustache, rue des saints pères.

La porte était de bonne facture, avec ses renforts pour résister aux entrées non désirées. Ce lieu était le temple des combines et des rencontres illégales. Le style particulièrement lugubre avait survécu à 170 ans de malfrats en tout genre. Il n’y avait que les garous qui n’y étaient pas venus. Un endroit parfait pour que tout le monde en  ville sache que l’on arrivait enfin arrivé d’un long voyage. Bitlibuz était à l’étage et écoutait les discussions des hommes qui cherchaient ici la tranquilité. Un petit détour par derrière son épaule sans qu’il me voit et la surprise sera de taille pour ce petit curieux.

« Alors, on écoute aux portes maintenant ? »lui glissais-je à l’oreille tout doucement. Bitlibuz l’ancien eut un geste de recul irréfléchi et se retrouva maladroitement le cul sur le sol. Son sobriquet n’était pas mal appropié dans son cas. Il avait tout à fait l’air d’un vielliard ainsi sur le sol. Regardant à gauche et à droite, en l’air et derrière lui se demandant quel maraux lui avait fait subir cet affronts. Qui aurait pu dire que se petit fou avait naguère renverser tous les petits Setites de France et de Navarre en un mois sans demander l’aide de qui que se soit. Il m’avait étonné cette fois-ci. En fait il l’avait fait pour rentrer en contact avec moi. Voilà des manières bien agréables de se faire des amis.
« Qui ose ainsi se méprendre sur ma personne !! Ne sait-on qui je suis!! Je suis Orphéas, le seigneur de la nuit, maître des onzes secrets interdits et des douzes paroles du sombre ipssissimus obscur. Qui ose ainsi me défier ! Qu il meurt sur le champ »
– « Au maître du sombre moment, je signale la présence devant ses yeux de Saint Isaïe, maître de l"invisible ! Je viens vous mettre au défi ! Trouvez-moi et je vous montrerai mon vrai visage ! »
La peur pouvait se lire sur son visage. Il savait que le monstre qui était devant lui faisait preuve d’une maîtrise supérieure à la sienne dans l’art de se dissimuler. Il n’est jamais bon de se trouver dans cette position. Je sentais la peur monter lentement dans son sang. Ce moment était des plus amusant. Je savais qu’à partir d’un certain point, il finirai par danser et chanter sur place. Une terrible danse macabre pour celui qui ne le connaissait pas. Il ne me fallut pas attendre longtemps pour le voir sortir sa lame et chanter un magnifique Te Deum. Cette petite folie lui était apparue le soir du sombre trépas de son sire à l’opéra de Vienne. Il tua son père pour se nourrir de son sang riche d’inhumanité et de péchés. La vieillesse mène l’âme perdue des cadavres au tréfond des abîmes de la folie. Depuis cet instant, il pratique l’art du combat en chantant. Quelle fine lame ! ! ! Et que d’air balayé ! ! ! Et quel bruit ! ! !
En me servant une pinte de bière fraîche qu’une serveuse charmante avait amenée ici sans même s’en rendre compte, je me plaçai discretement derrière lui. « Merci, ma douce, et regarde un peu dans ton décolleté, c’est une écu glacé par le froid hivernal qui te caresse le sein. Bonne soirée à toi petite et surtout évite le voleur qui se tient péniblement au comptoir ! lui aussi t’a repéré »
– «  Bon, c’est pas enfin bientôt fini ton bordel maintenant, l’ancien ! ! On s’entend plus penser ici ! ! ! »
– « Mort à toi, rejeton de détritus de fausse double croche en ut majeur ! Tu gouteras du goût amer du fer forgée sur les forges de Satan de ma lame affamée ! ! ! »
Ce petit rigolo faisait suffisant de bruit pour reveiller la capitale toute entière. Heureusement que je pouvais étouffer son brouhaha et ainsi conserver notre petite tranquilité. Je fis sentir ma présence grace à une dague sous son cou. Il fit mine de déglutir et demanda un dernier verre de cognac. La peur était à son comble. C’était à ce moment qu’il se rapprochait le plus de son humanité d’autrefois. Il m’avait fallut du temps pour comprendre cet être de folie. Une fille de Saulot m’avait dit qu’il franchirait sûrement le suspire une nuit en se surprenant dans un miroir. La peur était sa rédemption,et moi son ami.
«  fils de charogne, maladie de cancrelat, tu ne feras pas de vieux os ! j’ai de vieux amis qui veillent sur moi. Ma mort te mènera à ta perte.
– Pour cela, il faudrait que je me tue, vil tueur de petits Setites ! ! ! !
– Le Misanthrope ! ! ! ! ! ! Toi, ici, tu ne devais être en ville que dans trois nuits. Assieds-toi, et raconte-moi ton voyage ! D’où viens-tu cette fois-ci ?
– Je reviens de Jérusalem la pieuse. Je viens enfin te liberer de ta dette envers moi. Mais écoute-moi bien d’abord. C’est une affaire importante. Un compte important que j’aie à régler ici. Et tu seras mon arme pour porter le coup fatal à Altaïr.
– Altaïr, le vieux fou. Tu veux ma mort. Il a quatre générations de moins que moi.
– Et alors, moi aussi ! Et tu n’es pas mort à ce que je sache ? ! !
– D’accord, mais moi, que veux-tu que je fasse ?
– Dans trois nuits, tu iras voir Villon et tu lui diras la phrase suivante :  « Les astres me parlent. Ils me disent que la mort va descendre sur la flottante. Ta ballade te mènera à la lumière si tu bouges.Le noir rejoint le onzième. La lumière des étoiles ne ment jamais. L’Aigle va perdre un de ses fils. Ne dit rien, ne bouge pas. Ta sagesse te sauvera. »
– C’est tout ?
– Oui, c’est tout, attends trois nuits et demande une audience. Il te recevra.
– C’est tout ?
– Non, ce n’est pas tout. La jeune servante aura des problèmes en rentrant chez elle tout à l’heure. Sauve-la. Donne-lui trente écus et demande-lui de partir pour Lyon. Elle t’écoutera. Elle devra aller au 30 rue des tisserands. C’est un restaurant, le patron l’embauchera. Son petit-ami la suivra. Il sera embauché là-bas aussi.
– Pourquoi ?
– T’occupe !
– D’accord, le libraire, d’accord !
– T’as bien tout compris, je me répète pas ?
– Non, fais-moi confiance ! »
C’est en rigolant que je quittais mon ami l’ancien. « Fais moi confiance », c’était bien là une parole de malkav’.

J’avais trois heures de retard quand j’arrivais chez victor. Il m’attendait près du feu qu’il avait fait lui-même dans sa cheminée. Depuis déjà longtemps il ne se formalisait plus de mes horaires nocturnes. Je l’écoutais avec attention et ne lui fis aucun commentaire. Je les gardais pour moi. Je ne voulais pas déformer ses écrits. Je ferais ma version au labo…
Vers six heures du matin, je pris congé de mon hôte, et repartis dans notre demeure.
Deux ans plus tard, Yserius le sombre venait à passer par Paris. Pour voir son frère de sang, Altaïr. Villon n’aimait pas trop la présence de quatrièmes trop puissants dans sa ville. S’il savait. Sa ville…
Malgré sa position difficile à tenir, le prince de France ne bougea pas, suivant la parole du sage bitlibuz. Lasombra allait perdre une larme sanglante ce soir. Villon allait servir d’appât pour un piège à gros gibier. Sur son trône, immobile, le prince attendait que les événements se produisent. « Ne pas bouger. Ne pas fuir. Ne pas mourir. » se disait-il.
Yserius et Altaïr surgirent dans l’Elysium, en éliminant rapidement les goules de garde en faction dans la salle.
– Que d’audace ! Venir ici, à Paris, aux yeux du monde pour attaquer mon repère.
– Tais-toi, vermine, et donne-nous l’objet. Nous savons que c’est toi qui le possède ! !
– Quel objet !
– Silence ! ! ! ! ! ! ! !
– La piste de Juray nous a menés à Jérusalem. De là-bas, la piste nous dirigea tout
      droit jusqu’à toi. Alors maintenant, Donne le nous gentillement ou …

La fureur pouvait se lire dans les yeux des deux frères . La colère les aveuglait aussi bien l’un que l’autre. Villon n’était pas fier. Le rôle de pion n’est pas très enviable. Surtout quand on ne sait pas sur lequel des échiquiers de vieux fous on se trouvait placé. Lazarus fondit directement sur Yserius pendant que Cylt s’occupait d’Altaïr. Enfin, les deux déchets, les fils de l’ombre, ensemble, hors de leur cachette, enfin à découvert, là où nous le voulions, quand nous le voulions. Villon ne vit rien que les deux cadavres se répandrent rapidement sur le sol marbré de sa salle…et des ombres qui jouèrent quelques instants dans la lumière. Sur son trône, il trouva un mot « Merci ». Et un livre, un vieux livre, un très vieux livre…un très très vieux livre…
 
 
 

Aryaman vampire  quatrième génération
 

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